En déplacement à Saint-Laurent du Maroni du 17 au 19 mai, Gérald Darmanin a suscité la controverse en tenant des propos particulièrement agressifs à l’égard d’un journaliste de Guyane la 1ère. Une attitude jugée “indigne” et “inacceptable” par les syndicats de journalistes, qui demandent des excuses publiques.
Le contexte était déjà tendu : avant même son arrivée, Gérald Darmanin avait annoncé dans Le Journal du Dimanche l’implantation en Guyane de "la troisième prison de haute sécurité de France", destinée à accueillir "les profils les plus dangereux du narcotrafic" et des "islamistes radicalisés". Une décision prise sans consultation des élus locaux, dans un territoire encore profondément marqué par le passé carcéral de la colonisation, notamment à Saint-Laurent du Maroni, ancienne capitale du bagne.
C’est précisément cette mémoire douloureuse que le journaliste de Guyane la 1ère a voulu évoquer, en interrogeant le ministre sur les craintes d’un retour symbolique à l’époque pénitentiaire. "Les citoyens ultramarins, surtout en Guyane, y voient un peu comme un retour du bagne", a-t-il fait valoir. Une remarque que le ministre a balayée d’un revers de main, en la qualifiant d’"insulte à la République".
"Complètement idiot"
Mais la tension est montée d’un cran lorsque le journaliste a insisté : "Je vous dis ce que pense aujourd’hui la population". Réponse cinglante du ministre : "Vous êtes journaliste, d’abord en plus d’être complètement idiot… C’est une insulte, c’est complètement idiot, bien sûr, et c’est une insulte car ce sont des magistrats indépendants qui prennent les décisions de détention […]".
Une attaque personnelle inacceptable selon les syndicats SNJ et UNSA-SRCTA Guyane qui ont réagi dans un communiqué commun : "Qualifier ‘d’insulte à la République’ la question légitime d’un journaliste est indigne d’un ministre ! Et l’usage du mot ‘idiot’, qui semble d’abord s’adresser au collègue, est également indigne !"
Le communiqué rappelle que "non, monsieur le Ministre, il n’est pas ‘idiot’ de rappeler que la Guyane a été une terre de bagne, que cela a laissé de profondes blessures, et qu’on ne fait pas n’importe quoi avec cette mémoire, surtout à Saint-Laurent du Maroni !"
Les syndicats exigent des excuses publiques de Gérald Darmanin à l’égard du journaliste visé et de l’ensemble de la rédaction de Guyane la 1ère, dénonçant une "atteinte à la liberté de la presse, principe fondamental de notre démocratie".
"Les journalistes de Guyane la 1ère sont là pour poser les questions de fond, n’en déplaise à un ministre ‘hors sol’, de passage sur le territoire", conclut le texte. Pour beaucoup, cette altercation est le symptôme d’un mépris persistant envers les réalités et les sensibilités ultramarines.